10 mythes sur l'école à la maison

mythe école à la maison éducation Jan 17, 2023
homeschooling

Passionnée d’éducation, je n’hésitais jamais à sortir du cadre scolaire et utiliser des méthodes non traditionnelles pour susciter l’intérêt d’apprendre de mes élèves. En me retirant du milieu scolaire, pour des raisons personnelles, je n’ai pas hésité une seconde à accompagner les parents qui désiraient faire l’école à la maison dans leurs démarches au point où j’ai choisi, à mon tour, d’éduquer mes enfants à domicile. Cependant, j’ai vite constaté que la société, les collègues et les proches avaient énormément de préjugés contre l’école à la maison.  Suite à l’essor de l’instruction en famille depuis la situation pandémique de 2020, je pensais que ces préjugés s’atténueraient. Toutefois, je constate avec les années que les idées fausses sur les homeschoolers (les jeunes qui font l’école à la maison) continuent de persister. Comme il y a de nombreux mythes récurrents, j’en ai identifiés une dizaine à rectifier, classés en cinq catégories : la légalité, la socialisation, les parents, les apprentissages et le futur.

 

Catégorie : La légalité

Mythe #1 C’est juste les familles qui voyagent qui peuvent faire l’école à la maison.

Les voyages ne sont qu’une raison parmi tant d’autres de faire le choix d’instruire son enfant en famille et n’ont aucune incidence sur la législation qui varie selon les pays et les régions (les états, les provinces, les cantons, etc.). Prenons l’exemple du Canada où les parents déclarent leurs intentions de faire l’école à la maison, mais les formalités régissant l’école à la maison diffèrent en fonction de la province de résidence. En Colombie-Britannique, en Ontario et à l’Île-du-Prince-Édouard, une grande confiance est accordée aux parents… donc aucune démarche supplémentaire. Cependant, au Québec, les démarches sont plus complexes : les parents doivent produire un projet d’apprentissage, un état de situation, un bilan mi-parcours et un bilan fin de projet, en plus d’être soumis à une rencontre obligatoire avec une personne ressource, employée par le ministère, et à une des cinq formes d’évaluation spécifiées par le règlement sur l’enseignement à la maison.


Vous voulez en savoir plus sur les lois de l’école à la maison dans la francophonie mondiale ou ailleurs dans le monde? J’ai créé Le Guide de la francophonie mondiale de l’école à la maison qui est disponible gratuitement en téléchargement.


 

Mythe #2 Ce n’est pas n’importe qui peut faire l’école à la maison.

Comme mentionné précédemment, les lois diffèrent d’un endroit à l’autre dans le monde. En Suisse romande, par exemple, chaque canton a sa propre loi. Dans certains cantons, les parents doivent posséder un diplôme en enseignement. Néanmoins, pour la majorité des pays et régions où il est légal de faire l’école à la maison, tous les parents peuvent faire ce choix éducatif et être responsable de la scolarité de leur(s) enfant(s).

 

Catégorie : La socialisation

Mythe #3 Les enfants manquent de socialisation.

Concevoir l'école comme étant l’unique lieu où plusieurs enfants peuvent se regrouper, classifiés par âge, nous amène à croire qu'elle est le pilier du développement social de notre enfant et que, sans elle, il va y avoir des manques. Toutefois, il importe de distinguer la scolarisation et la socialisation. Nous pouvons déscolariser un enfant, mais nous ne pouvons pas le désocialiser. Ainsi, un parent peut retirer son enfant d’un établissement scolaire, mais il ne peut lui enlever ses compétences sociales, car il y a des conditions psychologiques et physiologiques qui sont propres à chaque individu. Dans le cas des enfants qui n’ont jamais mis les pieds dans un emplacement scolaire, puisqu’ils ont toujours été scolarisés à la maison, il a été démontré que ces derniers développent de bonnes aptitudes sociales par le biais de l'exemple de leurs parents et d'autres adultes dans la communauté, et par leur participation à des jeux et sorties avec d'autres enfants en petit groupe lors de rassemblements de plusieurs familles en groupes de soutien. L'ère technologique dans laquelle nous sommes amplifie les possibilités de socialisation grâce aux cours en ligne, aux rencontres de groupes pour échanger sur un sujet spécifique ou simplement aux rendez-vous avec des amis qui demeurent à longues distances. 

 

Mythe #4 Les enfants n’ont pas d’amis, autres que la fratrie.

D’une part, ce mythe oublie le facteur de la technologie qui permet d’élargir le cercle social tel qu’abordé au troisième mythe. D’autre part, le concept d’école à la maison ne signifie pas littéralement que l’enfant reste enfermé à l’intérieur de sa maison pour apprendre. Les enfants instruits en famille participent à des sorties en groupes scolarisés à domicile, des sorties culturelles ou sportives, ainsi qu’à des activités avec leurs amis du quartier les soirs ou les weekends. Ce quatrième mythe est corollaire, encore une fois, à l’idée utopique que la fréquentation scolaire crée automatiquement des relations amicales. Or, il n’y a de garantie que chaque enfant vivra une expérience sociale positive à l’école.

 

Catégorie : Les parents

Mythe #5 Les parents ne sont pas qualifiés pour enseigner à leur enfant.

Les changements sociaux nous ont amené à miser sur la réussite professionnelle. Par conséquent, nous nous sommes éloignés de l'idée que les parents d'un enfant sont les enseignants les plus importants de sa vie, ceux qui resteront présents plus d’une année dans sa vie et ceux qui lui montreront à marcher, à parler, à avoir confiance en lui, à persévérer, etc. Bien entendu, les fervents de ce mythe argumenteront que les parents n’ont pas les qualifications pour l’enseignement des matières spécifiques et des notions qui se complexifient avec les années dans le cursus scolaire. Pourtant, les parents qui instruisent leur(s) enfant(s) à domicile ont des centaines de ressources à leur disposition. N’oublions pas, je réitère, que l’accès à l’information par les technologies sont en croissance exponentielle. Également, nous ne pouvons juger insuffisant le bagage éducatif que chaque parent possède, car pour la plupart il s’agit d’atouts dans la scolarisation de leur(s) enfant(s) à la maison. Le Canadian Centre for Home Education (2009) a effectivement démontré, lors d’un sondage, que 17% des mères canadiennes, qui faisaient l’école à la maison, détenaient des brevets d’enseignement et avaient, pour la majorité, enseignées dans les écoles publiques. Un autre sondage de l’Association québécoise de l’éducation à domicile (2021) a établi que le niveau le plus élevé de scolarité du ou des parents-éducateurs, principalement en charge des apprentissages, est le 1er cycle universitaire.

 

Mythe #6 Les parents doivent arrêter de travailler pour bien s’occuper de leur enfant.

Il existe autant de parents que de manière d’instruire en famille. Au fil du temps, j’ai observé cinq modèles économiques : les deux parents qui travaillent à temps plein; un parent qui est à temps plein et un parent qui se consacre uniquement à l’école à la maison; un parent qui travaille à temps plein et l’autre à temps partiel, en plus d’être le principal responsable de l’école à la maison; deux parents à temps partiel et un parent sans emploi. Dans tous les cas, une multitude de choix et d’organisation familiale font en sorte que chaque modèle économique contribue au développement des enfants scolarisés à la maison.

 

Catégorie : Les apprentissages

Mythe #7 Les enfants jouent toute la journée (particulièrement sur les jeux vidéo).

Aucun parent retire son enfant de l’école dans le but que ce dernier puisse jouer aux jeux vidéo toute la journée. Certains enfants scolarisés à domicile ont d’ailleurs un horaire très semblable à celui d’un établissement scolaire, tandis que d’autres enfants n’ont aucun horaire, mais cela ne signifie pas pour autant qu’ils passent 12 heures d’affilée sur les écrans. Peu importe la manière dont nous concevons le jeu, il est bon de se rappeler qu’il s’agit d’une pédagogie en soi et non juste une récompense. Le jeu permet véritablement l’acquisition de connaissances et de compétences au niveau émotionnel, intellectuel et social.

 

Mythe #8 Les enfants font ce qu’ils veulent et n’apprennent pas autant qu’à l’école.

Distinguer apprendre et enseigner c’est essentiel pour recadrer ce mythe. Ce n’est pas parce qu’un enfant ne reçoit pas un enseignement qu’il n’apprend pas. Tout autour de nous est matière à apprendre et l’humain est naturellement curieux de découvrir son environnement.


Intéressés à aller plus loin dans la réflexion sur les apprentissages libres et naturels, je vous suggère de visionner l’entrevue que j’ai réalisée avec Jacinthe Beaudin, fondatrice de l’école Le coffre des curieux.


Par ailleurs, à propos du huitième mythe, il faut mettre en perspective que les élèves sont tous éduqués de la même manière dans les milieux scolaires. Si un élève apprend trop rapidement, il doit attendre que les autres rattrapent leur retard. À l'inverse, si la matière n'est pas enseignée d'une manière compréhensible, il prend du retard sur ses pairs. Dès lors, ces élèves sont plus susceptibles de se désengager et d'être frustrés par leur expérience d'apprentissage, tandis que, dans un environnement d’éducation à domicile, il a été démontré qu’un apprentissage personnalisé améliore l’acquisition des connaissances et des compétences, car il est bénéfique d’apprendre dans un environnement plus flexible, adapté à son rythme, à ses besoins et à ses intérêts.

 

Catégorie : Le futur

Mythe #9 Les enfants vont avoir de la difficulté à se conformer dans la société.

Certaines personnes expriment ce mythe aussi intensément que : « Tu ne peux pas faire tout ce que tu veux dans la vie, un moment il faudra qu’il aille à l’école pour apprendre la vraie vie, sinon il va avoir de la misère à fonctionner en société ». Quand quelqu’un m’aborde ainsi, je lui demande ce que représente la vraie vie pour lui et que signifie fonctionner en société. En outre, j’ajoute que dicter continuellement la conduite d’un enfant, le soumettre à une autorité où il n’y a pas de place aux opinions ou aux choix d’activités d’apprentissage, n’est pas un gage que l’on réussira à développer des valeurs de coopération, d’entraide, d’engagement et d’empathie chez un enfant pour bien agir, éventuellement, en société.


Encore là, je vous suggère d’écouter l’inspirante Jacinthe Beaudin, dans son entrevue, qui approfondie la réflexion de ce mythe.


 

Mythe #10 Les enfants vont avoir de la misère à obtenir un diplôme secondaire et à poursuivre leurs études post-secondaires.

Tout d’abord, l’obtention d’un diplôme secondaire pour les jeunes scolarisés à la maison dépend énormément de la façon dont la société perçoit l’instruction en famille. Prioriser la réussite de tous fera en sorte que des moyens seront mis en place, comme l’obtention d’un diplôme secondaire en ligne, pour que les adolescents éduqués à domicile accèdent davantage à un diplôme secondaire, sans se heurter à des centaines d’obstacles bureaucratiques. C’est le cas notamment de l’Ontario, province canadienne reconnue comme modèle de réussite scolaire.


Si l’école à la maison en Ontario vous intéresse, je vous invite à visionner l’entrevue que j’ai effectuée avec Marie-Claude Dubé, auteure et fondatrice de l’espace d’apprentissages libres Paradis Nature.


Ensuite, il importe de concevoir qu’il y a plus d’un chemin pédagogique pour obtenir un diplôme et, dans le même ordre d’idées, il existe différents types de métiers qui n’exigent pas nécessairement de posséder un diplôme post-secondaire. Le plus important est de discuter avec son enfant scolarisé à la maison pour savoir ses intérêts professionnels, afin de s’informer adéquatement des exigences des métiers lui correspondants. Côté statistique, des données du Canadian Centre for Home Education (2009) ont fait ressortir que les adolescents canadiens instruits en famille deviennent de jeunes adultes plus éduqués que leurs pairs canadiens. Il y aurait une plus grande proportion des diplômés de l’école-maison, âgés entre 15 et 35 ans, détenant un baccalauréat, une maîtrise ou un doctorat.

 

Somme toute, ce que j’ai pu constater depuis toutes ces années, c’est lorsqu’une personne me partage ses craintes ou ses fausses croyances sur l’école à la maison, il s’agit plutôt de ses propres peurs. De ce fait, lorsqu’on me dit que les enfants scolarisés à domicile n’auront pas autant d’amis qu’à l’école, étrangement ce commentaire provient constamment d’une personne solitaire. Quand quelqu’un tente de justifier à quel point les parents ne peuvent être compétents, elle est, sans aucun doute, une personne qui a la réputation de ne pas être compétente dans son emploi. Lorsqu’une personne insiste sur l’obligation de fréquenter un établissement scolaire en vertu de la conformité de la société, je découvre souvent, au fil de la conversation, qu’elle se sent opprimée par certaines obligations : le meilleur moment de sa vie étant un voyage en famille pendant un an sans la routine boulot-dodo. Intéressant, n’est-ce pas? Alors, dites-vous bien que l’école à la maison est un choix éducatif comme un autre et qu’il n’y pas a un chemin pédagogique plus valable qu’un autre, puisque chaque enfant est unique!